Vues d'expositions

Machines de Production, 2021.

Musée Soulage, Rodez. (Commissariat, Benoît Decron).

À Rodez, nous présentons des installations, des sculptures, des maquettes, des gouaches… Tout cela s’étale et se dresse dans l’espace très ajusté de la salle d’exposition temporaire (hauteur, volume, circulation) : le Terrier, une thébaïde contemporaine (2004), la Méga-maquette (1998 -2020), un rêve d’ado déstablisant, organisme subtil avec beaucoup de détails et de ramifications, l’Orgue à pets (1996), une figure de soufflerie égotique, les Soupes, inextricables et bavardes gouaches, et la monumentale Boîte noire (2015) manège de cimaises – 96 gouaches en noir et blanc, isolées, ou par deux, par six, par huit – sur lequel les visiteurs peuvent monter et se faire entraîner. Magic Roundabout, un théâtre inquiétant et pédagogique. La Boîte, un monde qui tourne, offre un accrochage-panorama de Dessins noirs : en restant patiemment devant, on les voit tous. L’œuvre est reconstituée pour la première fois depuis l’exposition Éco Système à La Friche Belle de Mai à Marseille. Si Barbier s’est affirmé en tant que sculpteur, il a aussi l’autorité d’un peintre.

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Gilles Barbier affirme tourner autour de deux concepts : l’avatar et la suspension. Une succession d’opérations aboutit pour lui à la production d’une œuvre d’art contingente, reproductible, permutable ou échangeable, modifiable. Toutes ses versions potentielles forment l’écosystème de l’œuvre proprement dite. « Cette idée m’incite à penser qu’une œuvre peut se ressasser (ou se ruminer) dans un organe qui recycle le processus exclusif du « ou » (déterminant son émergence) en un ensemble circulaire lié par l’énergie des « et » produit par la somme de ses versions. » Ce sont les Machines de production, à la fois cohérentes et surprenantes, en supposant qu’elles ne s’arrêteront jamais. Derrière l’expression du grotesque, se cache l’eschatologie, les fins dernières de l’homme. Se cachent aussi nos origines. On l’aura compris, les Machines de production ici rassemblées sont les processus successifs d’un modus operandi, les étapes d’une réflexion sur un travail commencé il y a 25 ans. Dans les premières images du film « 2001, L’Odyssée de l’Espace », des singes tournent comme des électrons autour d’un monolithe étrange, tombé du ciel et planté dans le sol : surprise (stupéfaction), intérêt, exploration. Nous aimerions, modestement, que l’exposition procure des sensations analogues.

Benoit Decron.